Sud-Aveyron. Le pérail, il faut en faire tout un fromage !

Fanny Alméras
Fanny Alméras
Lecture 4 min.
Des membres de l'association en mars 2020.

Au mois de juin dernier, l’association de défense et de promotion du fromage de brebis de pérail s’est vu refuser sa demande d’AOP (Appellation d’Origine Protégée) par le Comité National des Appellations d’Origine (CNAO).

Une décision reçue « comme une balle tirée à bout portant », mais qui n’a pas tué la motivation de ses membres. Ils ont décidé de ne pas se laisser abattre en demandant une « IGP », une Indication Géographique de Provenance.

La dernière chance

Depuis 25 ans, l’association milite et se bat pour protéger le pérail en lui attribuant une AOP.

En juin dernier, la réponse du CNAO avec 79 % de « non » a été reçue comme « une douche froide ». À partir de ce moment, n’importe qui pouvait prétendre fabriquer du pérail, n’importe où et avec n’importe quel lait : inconcevable pour l’association qui a immédiatement décidé de faire une autre demande, cette fois auprès de l’IGP. Jean-François Dombre, le président de l’association précise que la motivation première est de défendre le pérail et tous les producteurs associés.

« Cela protège le pérail pendant toute la durée de l’instruction du dossier et évite que n’importe qui s’empare du nom pour fabriquer un fromage qui ne serait pas du pérail. Nous n’hésiterons pas à porter plainte si tel était le cas ».

D’un point de vue juridique, même si ce n’est pas une AOP, l’IGP offre la même protection. Elle identifie un produit agricole dont la qualité, la réputation ou d’autres caractéristiques sont liées à son origine géographique, à un savoir-faire, et lui confère dès lors une protection à l’échelle nationale, mais aussi internationale.

Aujourd’hui, plus de 1.000 tonnes sont produites chaque année et 400 emplois sont liés à sa fabrication. Cette reconnaissance par une IPG représente certainement la dernière chance de voir ce petit fromage à pâte molle reconnu et protégé.

Un nouveau souffle

Pour à nouveau rassembler et fédérer autour de la défense du pérail, l’association a décidé de créer un organisme de défense et de gestion du pérail qui se substituera à l’association. Il réunira l’ensemble des acteurs du pérail : artisans, coopératives, agriculteurs et producteurs. Il sera lancé lors d’une l’assemblée constituante extraordinaire le 24 janvier prochain. Mathieu, agriculteur lance un appel à ses confrères.

« Les jeunes doivent s’emparer de ce dossier pour en assurer la suite et le faire aboutir ».

Ce comité devrait être actif dès les premiers mois de l’année et reposera sur des élections régulières et une présidence tournante, ce qui implique que Jean-François Dombre n’en sera plus le président.

Une reconnaissance

Pierre Gaillar, agriculteur local impliqué dans la défense du pérail pense que derrière le problème de protection d’un savoir-faire, d’une production locale et la défense d’un territoire, se cache aussi « une grave crise de reconnaissance du travail des agriculteurs, et qu’il ne faut pas l’oublier ».

« Aujourd’hui, si tous les jours un paysan se fout en l’air, ce n’est pas pour rien ! »

L’attribution de l’IGP pourrait prendre environ trois ans selon la direction de l’INAO (Institut National de l’Origine et de la Qualité) qui instruit le dossier, et qui a promis de faire le nécessaire pour que cela ne dure pas plus longtemps. Elle marquerait la fin d’un long et douloureux combat pour la protection du pérail et une reconnaissance tant attendue pour toute une filière.

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