Aveyron. Les intermittents du spectacle inquiets pour l’avenir

Fanny Alméras
Fanny Alméras
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Festival détours du monde à Chanac. ©Hugo Bruel.

Depuis le début de la crise sanitaire du coronavirus, la plupart des intermittents du spectacle ne travaillent plus. Dépendants d’un statut déjà précaire, ils sont nombreux à se demander ce que sera demain.

En 2014, plusieurs collectifs d’intermittents du spectacle ont été créés pour barrer la route au gouvernement et à la réforme du chômage qui précarisait leur régime indemnitaire. C’est ainsi que le « CIA » (Collectif des intermittents de l’Aveyron) a vu le jour.

Aujourd’hui, comme dans de nombreux domaines, Benoit Sanchez Matéo, membre du CIA s’inquiète de la crise économique qui va succéder à la crise sanitaire et toucher de plein fouet tous les acteurs culturels. L’annonce faite par le président de la république lundi 13 avril de ne pas rouvrir les salles de spectacles avant mi-juillet n’a fait que renforcer ce sentiment.

« Pour beaucoup d’entre nous localement, l’été est une grosse saison : je pense à tous les festivals comme celui de Millau en Jazz ou des Natural Games qui sont annulés les uns après les autres, et ce n’est que le début ».

Leur programmation demande une organisation parfois colossale en amont de l’évènement. Sans une date officielle de reprise, ce qui est le cas à ce jour, même ceux qui ne sont pas dans la zone temps des rassemblements interdits, ne prendront certainement pas le risque d’une annulation à la dernière minute. Ce sont des dizaines de dates qui vont être supprimées, autant d’heures de travail en moins pour tous les intermittents qui voient leur avenir s’assombrir de jour en jour.

« Cette configuration est ingérable, nous aimerions que le ministre de la Culture se prononce sur une date butoir ou sur l’annulation pure et simple de la saison ».

Le spectacle l’Aiglon à Rodez. ©Benoît Sanchez

Des mesures fortes sur le long terme

Pour faire face à la crise, le gouvernement a rapidement pris des mesures d’urgence par décret pour leur faire bénéficier d’un chômage partiel, « mais cela ne suffira pas à moyen et à long terme » d’après Benoît Sanchez Matéo qui assure que « la profession dont le statut a été mis à mal par des réformes successives ne se relèvera pas si d’autres actions ne sont pas mises en place rapidement ».

Le collectif voudrait obtenir la création d’un fond de rattrapage (de solidarité) par l’état, comme ce fut le cas en 2004 après les manifestations et les grèves des intermittents provoquées par le durcissement des conditions d’accès à l’indemnisation.

Il demandera ensuite l’annulation de la nouvelle réforme qui devait entrer en vigueur le 1er avril et que le gouvernement a reportée au mois d’octobre devant l’ampleur de la crise.

« Le collectif restera vigilant et saura se mobiliser pour peser sur l’UNEDIC (association chargée par délégation de service public de la gestion de l’assurance chômage en France) ».

Jouer le jeu

Au niveau de la programmation estivale, Benoît Sanchez Matéo met l’accent sur certaines structures qui ont aussi un rôle à jouer. « Qu’elles soient privées ou publiques, celles qui bénéficient de subventions de l’état ou des collectivités doivent jouer le jeu et payer les sessions programmées qui seront annulées. Elles ont reçu leur budget pour la saison, il serait logique qu’elles ne le gardent pas pour l’année prochaine ».

Le collectif est conscient de traverser une grosse crise, mais ne veut pas être alarmiste.

« Nous serons vigilants sur les conditions sanitaires de travail et bien sûr sur tout le volet social. Nous avons un rôle important d’émancipateur, la crise actuelle a démontré à quel point la culture était importante pour ouvrir l’esprit et avait sa place dans notre société ».

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