[dropcap]D[/dropcap]ans un élan de franchise qui vous honore, vous me répondez en affirmant que l’hôpital médian que l’on nomme désormais hôpital unique est votre objectif. Cela ne nous surprend pas, car c’est pour de tels mauvais coups sanitaires que depuis la loi Bachelot, les directrices et les directeurs d’hôpitaux publics sont nommés, les élus, les soignants, les usagers n’ayant qu’à subir. Vous partagez avec moi le sentiment que la crise sanitaire a ouvert les yeux, pour ajouter ce qui est surprenant que le gouvernement en a pris conscience et a commencé à le prouver.
Je ne vais pas vous répondre sur « le Ségur de santé », les personnels soignants ayant très majoritairement exprimé leur déception et leur colère. Sur la prise de conscience du gouvernement, nous n’avons pas, Madame Marty, la même vision. Je prendrais pour exemple l’Ile-de-France où les choix politiques que vous défendez ont des conséquences dramatiques.
En effet, la région parisienne manque cruellement de lits de réanimation ; 1200 lits pour 12 millions d’habitants ! Les urgentistes dénoncent ce scandale depuis l’épisode de la canicule en 2003. Les gouvernements successifs ont aggravé la situation, car la seule rentabilité financière guidait leurs choix.
Et sous le gouvernement Macron, qui selon vous a pris conscience, des fermetures d’hôpitaux sont annoncées – Bichat, Poincaré à Garches, Verdier à Bondy et l’hôtel-Dieu où de grands et coûteux travaux sont effectués, non pas pour le rénover, ce qui serait bien utile, mais pour construire une galerie commerciale de grand luxe ! J’ai du mal à croire Madame qu’avec le président des riches, comme hélas avec ses prédécesseurs, l’humain passe avant le fric.
Quel rapport me direz-vous entre la région parisienne et le Sud-Aveyron ? C’est simple, comme partout en France, ils subissent depuis des années des choix politiques austéritaires, une logique comptable qui fait que 80 % des hôpitaux sont dans le rouge financièrement. Alors que la puissance publique devrait tout mettre en œuvre pour relancer notre système de santé, tout est mis en œuvre pour fermer des lits, des services, des hôpitaux de proximité, réduire et détériorer l’offre et la qualité des soins, supprimant des emplois tout en continuant de surexploiter le personnel soignant restant.
Faut-il vous rappeler que partout où l’on a fermé les hôpitaux de proximité pour les remplacer par des hôpitaux médians, cela s’est traduit par un échec sanitaire et financier. Ce n’est pas moi qui le dénonce, mais un rapport de l’IGASS (Inspection générale des affaires sanitaires et sociales) que par votre fonction, vous ne pouvez ignorer.
Pourtant, vous êtes confrontée directement aux conséquences d’une crise sanitaire. L’hôpital de Millau est en manque de personnels. Les soignants sont exténués. Les malades non-COVID sont transférés à l’hôpital de Saint-Affrique. Où iraient-ils s’il n’y avait qu’un hôpital commun dans le Sud-Aveyron ? Et je peux témoigner que dans ces cas, malgré le sérieux et l’humanisme qui animent les personnels, la perte de proximité a des conséquences familiales, donc humaines négatives.
Aussi, soyez-en persuadée, même en continuant de nous présenter l’hôpital médian, aujourd’hui unique, comme une solution miracle, alors que le rapport MUPY a eu le mérite de dévoiler ses conséquences, nous ne lâcherons rien ! Nous continuerons à nous battre pour garder nos deux hôpitaux de proximité pour répondre pas seulement à l’offre de soins, mais aux besoins de santé de la population du Sud-Aveyron.
Martine Perez,
ex-conseillère régionale communiste
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