A l’initiative d’un entrepreneur privé local, un projet de création d’un abattoir et atelier de découpe de volaille est en cours d’émergence dans le Sud Aveyron. Il est accompagné par la Chambre d’agriculture et le PNR des Grands Causses dans le cadre du Projet Alimentaire de Territoire. L’occasion pour nous de faire un état des lieux de la filière avicole en allant à la rencontre de Benoit Quintard, éleveur de volailles à Saint-Félix-de-Lunel.
[dropcap]E[/dropcap]n 2020, malgré le contexte de crises, la filière avicole a su résister. La crise aviaire a de nouveau touché la filière après les épisodes de 2015 et 2017 qui avaient été suivis par un retour plus calme en 2018. Pour autant, la consommation nationale est stable par rapport à 2019, tirée vers le haut par la consommation de poulet (71% de la consommation).
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Le regard de Benoit Quintard, éleveur de volailles à Saint-Félix-de-Lunel
Comment a évolué la filière avicole locale ces dernières années ?
La filière présente une dynamique certaine, tout particulièrement autour des circuits courts et de la production d’œufs, car les opérateurs sont plus présents localement. Le poulet est le produit qui tire la filière vers l’avant du fait de la hausse de la consommation au niveau national. Beaucoup de personnes se questionnent sur l’activité volailles, car c’est une activité qui nécessite peu de surfaces et requiert des investissements mesurés pour se lancer contrairement à d’autres productions.
Quels sont les profils des nouveaux projets avicoles ?
On voit vraiment tout profil ; des installations, des reconversions, des ateliers de diversification pour générer des compléments de revenus. Le test est « facile », le porteur de projet prend peu de risques s’il n’investit pas dès le début dans un outil d’abattage. De plus, la production démarre vite et peut vite être suspendue du fait des cycles de productions plus courts.
Quels ont été les impacts de la crise de la Covid-19 sur la filière ?
Les modes de consommations ont évolué ; les gens ont plus été en recherche de proximité et de praticité (viande découpée, en petite quantité, facile à cuisiner). Cela a boosté la filière. Pour ce qui nous concerne, nous avons connu une hausse de + 20 % de chiffre d’affaires lors du premier confinement par rapport à l’année précédente, et ce, malgré l’arrêt des ventes à nos grossistes sur Paris ; la preuve que la demande locale a fortement évoluée. La demande en œufs a également été très importante : on a constaté une hausse de plus de 50 %, nous n’avons pas pu répondre à toutes les demandes…
Pour la partie découpe, la demande est en hausse. A l’heure actuelle 15 % des poulets abattus/semaine sont découpés. Dans notre activité au quotidien, cette évolution des tendances de consommations nous a incités à réfléchir à développer de nouveaux services : proposer des petites quantités (par exemple deux cuisses de poulet), des produits surgelés pour élargir les DLC, ou encore des plats cuisinés.
Quelles sont, selon vous, les perspectives d’évolution de la filière ?
Je suis assez optimiste pour la filière compte tenu de la consommation de volailles. Il s’agit d’une source de protéine qui reste assez bon marché pour les ménages. Et au-delà de ça, c’est la qualité et la valeur vendue autour du produit qui importe et qui est recherchée par les consommateurs. Le prix n’est pas un facteur limitant.
Il y a de la place pour de nouveaux projets, notamment en circuit court. On constate une hausse des projets autour de ces circuits de commercialisation. Les débouchés existent localement, mais pas uniquement : il y a de réels débouchés dans les régions parisienne ou méditerranéenne notamment.
Par ailleurs, historiquement et culturellement, il n’y a pas, dans l’Aveyron, une très grande sensibilité à l’élevage de volailles, contrairement à des départements voisins comme le Lot et le Tarn. Mais les mentalités évoluent.
Par contre, nous allons être amenés à développer la découpe, car je pense que cette demande va perdurer, tout comme celle autour des plats cuisinés.
Les risques principaux qui pèsent sur la filière restent les risques sanitaires (ex. : grippe aviaire). Dans l’Aveyron, nous avons la chance d’y être moins confrontés, car nous sommes moins sujets à des densités importantes dans les élevages, ce qui n’est pas le cas de toutes les régions.
Quel est le facteur limitant au développement de la filière localement ?
Les outils d’abattage et de découpe. Actuellement, les lieux d’abattage sont trop éloignés des élevages, ce qui ne permet pas à bon nombre de projets d’aboutir. Certains producteurs peuvent faire plus de 80 km (aller) pour un volume de volailles qui n’est pas forcément conséquent. Ces coûts logistiques ne sont pas négligeables.
La main-d’œuvre, les investissements et les exigences réglementaires et sanitaires sont également des éléments essentiels à prendre en compte avant de se lancer dans une activité volailles. Se lancer seul dans un élevage de volailles avec transformation reste complexe. Notre force à nous, c’est que nous sommes quatre !
Les attentes sociétales évoluant, le bien-être animal est désormais également devenu primordial dans l’activité et dans les aménagements sur l’exploitation.
Un mot de conclusion ?
L’Aveyron en tant que tel est déjà presque une marque ; on bénéficie d’une notoriété qui porte l’ensemble des filières du département, pas uniquement la filière avicole. C’est une chance ! Le potentiel pour développer des projets est donc présent, l’enjeu principal consiste à ne pas trahir cette image et à continuer à proposer des produits de qualité, véhiculant cette image positive.
Propos recueillis par Manon Lilas
Cette action s’inscrit dans le cadre du Projet Alimentaire Territorial Grands Causses-Lévezou, porté par le PNR des Grands Causses, en partenariat avec la Chambre d’agriculture, l’APABA et les Locos Motivés, qui vise notamment à renforcer les filières locales dans le but de relocaliser les approvisionnements du territoire.
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Quel projet pour le Sud Aveyron ?
Des réunions de secteurs se tiendront mi-mai dans le Sud Aveyron pour échanger avec les agriculteurs autour de ce projet d’abattoir et atelier de découpe de volailles. Les lieux et dates seront communiqués dans un prochain article.
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[box type= »info » align= » » class= » » width= » »]Pour plus d’informations : Manon Lilas, Chambre d’agriculture (CDASA) : 05 65 98 16 00 / manon.lilas@aveyron.chambagri.fr[/box]