Font Doulce (commune de Saint-André-de-Vézines, Causse Noir)

Marc Parguel
Marc Parguel
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Font doulce en 2004 (DR)

[dropcap]F[/dropcap]ont Dolsa, l’IGN l’écrivant Font d’Oulsès, ne pas traduire faussement par « Fontaine d’eau douce », mais plutôt Dols : source, nous sommes en présence d’une répétition « la fontaine de la source », source communale de pied de falaise.

On la voit orthographiée Fons Doulsa. Terroir d’Oulsse, Font Doulsse, (d’après le compois de Montméjean, 1665). Elle apparaît en dessus du village de Montméjean, à 800 m d’altitude sur le passage du sentier botanique trilingue (français, latin, occitan) et surgit à deux niveaux.

Pourquoi sur deux niveaux ? La réponse nous est donnée par Roger Baumel que j’avais interrogé en  décembre 2003 : « il y avait des mines de charbon à Montméjean. Ma grand-mère faisait la pension à un moment donné à trois mineurs. Chaque mineur arrivait à tirer 100 kilos par jour. L’exploitation a été arrêtée au début du XXe siècle quelque temps avant la guerre de 1914-18, parce que cela ne rapportait pas assez. Les galeries d’environ 1 m 20 de haut allaient loin, et les mineurs ne rebouchaient pas toujours tous les passages qu’ils avaient creusés, tellement qu’un beau jour, la montagne s’est affaissée, il y avait une source après Montméjean : Font Doulce, et après que la montagne se soit  affaissée une partie de l’eau sortait par la galerie. C’est depuis ce jour-là, qu’une partie se perd sous terre et que la source coule sur deux niveaux. ».

Un sentier bien tracé nous emmène à la source résurgence de Font Doulce , son débit est bien faible. Un petit tuyau permet, avec de la patience, de remplir un verre d’eau fraîche.

Le tuyau qui délivre l’eau précieuse. (DR)

Elle a été très heureusement nettoyée et débroussaillée par l’association Vivre Montméjean, avec ses abords transformés en aire de pique-nique et sa mare permettant aux bêtes de venir se désaltérer, elles aussi, comme autrefois, les troupeaux.

Plaque près de la mare de Font Doulce. (DR)

Cette association s’est lancée en 2003 dans la réhabilitation des vasques d’aspect naturel pour recueillir l’eau de la source. De mémoire des anciens, une troisième vasque devait exister. Après un fastidieux travail, cette vasque creusée celle-ci de main d’homme et enfouie sous plus d’un mètre de déblai, a pu être dégagée. Cette réhabilitation a été couronnée par un prix décerné par la communauté d’agglomération en 2004.

Font Doulce (DR)

Près de la source, on trouve encore des traces de « faisses » qui étaient, autrefois aménagés pour les cultures, avec ses murs qui les protégeaient des troupeaux « fèdes » qui venaient ici se désaltérer. Roger Baumel a ce sujet pourrait aussi nous dire :  « Quand j’étais jeune, j’allais faire boire une vingtaine de garches à Font Doulce, je passais par en haut, je descendais à la Combe. En période de sècheresse, le troupeau de Brunas (M.Védrines) qui était constitué de 150 bêtes y allait, mais le chemin était difficile. C’était un chemin à mulet de 1 mètre de largeur à peine, et les brebis ne pouvaient passer que les unes après les autres. Il passait par le petit chemin de la mare de Montméjean, et au lieu de tourner au château, il continuait le chemin. Je n’ai pas souvenir qu’on y ait amené des bœufs. »

Il y a donc trois sampas ou vasques (deux naturels et un artificiel, recueillant l’eau) en période de sècheresse, qui permettaient aux troupeaux des domaines voisins de venir s’y abreuver. La conca (creux de rochers) de Font Dolsa, à moins de cinquante mètres en contrebas est fréquenté par les sangliers et autres sauvagines.

Fréquenté par les sangliers. (DR)

Au-delà des animaux, ce sont les hommes et femmes du village qui venaient ici chercher l’eau précieuse. Ainsi Juliette Ribas née Baumel (1914-2018) me racontait :« 1923. Les gros travaux de l’été sont achevés, c’est une année de sècheresse, de ce fait, il reste très peu d’eau au fond du puits pour abreuver le bétail. L’eau de citerne, la seule potable pour le ménage et pour la boisson commence à manquer. Il faut s’organiser, conduire le troupeau jusqu’au point d’eau le plus proche, aller jusqu’à la source qui se trouve à mi-chemin dans un travers qui descend à Montméjean. De bonne heure, ce matin tata Juliette a tressé une grosse toile, elle a fait une couronne qu’elle a posée sur sa tête. Elle a pris la grande conque de cuivre rouge et la voilà partie. Maintenant, elle suit le sentier qui descend jusqu’à Font Doulce. Il faut bien 30 minutes pour atteindre le point d’eau. La conque, une fois remplie (15 litres environ) ce n’est pas facile pour repartir avec le plein en équilibre sur la tête, c’est une vraie gymnastique, surtout ne pas faire un faux pas, telle que Perette et le pot au lait ! Il faut penser que c’est Juliette et la Conque d’eau ! Vous dire s’il faudra économiser ce bien précieux qui est cette eau de source, la ressortir pour se désaltérer. Je garde un souvenir de cet exploit qui paraît invraisemblable. »

Avec sa conque d’eau. (DR)

La fontaine de Montméjean, sur le passage du GR62, coule dans une petite conca. L’association Vivre Montméjean y a aménagé une aire naturelle de repos (Lo Pausador). Un bassin, en dessous du sentier permettait d’arroser quelques jardinets et des vergers.

En bordure de la D41, au point 529, la fontaine improprement appelée « des biches » est la déformation francisée de « Font dels Abits » (des sarments) car là s’étendaient en terrasses de petites vignes. Vu leurs dispositions, il semblerait que les sources la Conca, la Fontaine de Montméjean, la Font dels Abits soient des résurgences de Font Doulce.

Marc Parguel

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