Jean-François Rousset présente ses vœux à la Filature Colbert de Camarès

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Le Député de la troisième circonscription de l’Aveyron, Jean-François Rousset avait choisi la Filature Colbert à Camarès pour la présentation officielle de ses vœux aux habitants et élus du territoire. Elle a eu le vendredi 13 janvier en début de soirée et a été suivie d’un moment convivial à la salle des fêtes.

« C’est un vrai plaisir d’être avec vous ce soir. En préambule je voulais excuser toutes celles et ceux qui n’ont pas pu être là et qui m’ont demandé de les excuser qu’ils soient élus, institutionnels, citoyens ou amis. En particulier Jacques Godfrain qui a beaucoup fait pour notre région. 

Je veux aussi remercier la Filature, le Maire de Camarès Cyril Touzet et la Présidente de notre Communauté de communes Monique Aliès de nous accueillir.

C’est ma première cérémonie depuis mon élection. Et pourtant, pourtant…, j’ai l’impression que juin 2022 est loin ! Plus de six mois se sont écoulés depuis. C’est à la fois peu et beaucoup. Je m’approche du cap des 100 déplacements en circonscription. Le chiffre peut paraître un peu abstrait. Mais je sais ce qu’il signifie. Chaque rendez-vous est un morceau de vie. 

Des professionnels de santé bien sûr, j’en ai vu beaucoup. Comme vous le savez, le défi d’amélioration de notre accès aux soins guide mon mandat. C’est un sujet qui touche profondément l’Aveyron. Nous manquons de professionnels de santé et même si le numerus clausus a été supprimé en 2018, beaucoup reste à faire. 

La formation des médecins est longue et même si nous ne parviendrons pas à résorber un déficit vieux de trente ans en seulement quelques années, nous pouvons recréer les conditions d’un meilleur avenir. En particulier en nous attaquant aux questions de formation : en diversifiant l’origine sociale et territoriale des étudiants, en augmentant les capacités de nos universités de médecine, en repensant le recrutement des étudiants, ou encore en les incitant à s’installer davantage dans notre ruralité…

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Très concrètement, je plaide par exemple pour mettre en œuvre des politiques d’accompagnement spécifiques aux jeunes ruraux afin de les inciter à entreprendre des études de médecine. Car il suffit d’observer les parcours de vie pour voir que celles et ceux qui viennent exercer dans notre ruralité en sont souvent issus. Alors, c’est à nous de dire à nos jeunes qu’ils en sont capables, que les études de médecine sont un objectif atteignable. Et ce d’autant plus que les résultats de nos lycéens sont souvent meilleurs qu’ailleurs ! 

Le deuxième sujet de travail est celui de l’organisation des soins. Je dis souvent qu’il faut « libérer du temps médical ». Nous avons des compétences qui se chevauchent, d’autres qui sont sous-utilisées… par exemple les infirmiers… ils ont une compétence qui n’est pas pleinement mobilisée. 

Valorisons-les et donnons-leur les responsabilités qu’ils méritent. Notamment pour prendre en charge des pathologies bénignes qui ne nécessitent pas l’intervention d’un médecin. Ainsi nous libérerons du temps médical que les médecins généralistes pourront consacrer aux pathologies les plus complexes. De la même manière, nous pouvons désengorger nos urgences en repositionnant chaque compétence à sa bonne place.

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Je le souligne : ce n’est pas qu’une affaire de médecins. Chaque soignant a une place déterminante dans notre système de soins. Donc pour 2023, je fais le vœu et je travaillerai à ce que, dans le sud Aveyron, nous donnions à chacun sa bonne place.   

Je ne reviendrai pas sur toutes les opportunités à creuser autour des Maisons médicales, de la télémédecine, de la téléexpertise… mais sur la question de la santé sachez que les solutions existent et grâce à la mobilisation de tous, nous sommes capables d’avoir des résultats. C’est aussi dans cet esprit qu’il nous faudra travailler sur la construction de l’Hôpital commun. 

Déjà je me réjouis que la ministre nous ait fait l’honneur de sa visite. C’est une étape décisive. Elle nous met en situation pour avancer rapidement et ainsi répondre à l’urgence de la situation.  

La santé bien sûr, mais pas seulement. À l’occasion de mes déplacements, j’ai rencontré des associations. Je pense à Myriades, Tremplin pour l’emploi ou encore les Jardins du Chayran…

Et sans revenir sur la contribution de chacune je veux ici souligner la qualité de notre tissu associatif, l’ampleur de leur engagement, la force d’âme qu’elles insufflent dans tous les pans de la société, le dynamisme qu’elles ajoutent à notre ruralité. Grâce à nos associations, nous avons une offre de services et d’activités précieuses pour l’attractivité de notre région. Merci à tous celles et ceux qui les animent au quotidien ! 

Je me suis aussi déplacé dans de nombreuses entreprises. Que ce soit dans le secteur agricole, celui des transports ou même des énergies renouvelables… sujet sur lequel j’ai récemment porté plusieurs amendements à l’Assemblée nationale. 

Chaque fois que nécessaire, j’ai fait le lien avec Paris pour relayer les demandes et défendre nos intérêts. 

J’ai répondu à toutes les sollicitations recoupant l’intérêt général de notre circonscription. C’est ma responsabilité de Député et je la prends avec cœur. Car cet enjeu de médiation et de valorisation de notre territoire est pour moi l’un des plus stimulants. 

À chaque rencontre, je mesure l’énergie déployée en faveur de notre région. Qu’elles soient économiques, sociales ou environnementales, ces énergies sont la base de la valeur ajoutée que nous produisons. C’est pourquoi il est bon de pouvoir constater que ces richesses sont le plus souvent restées locales. En Aveyron, nous avons conservé la main sur une bonne partie de la chaîne de production. De la matière première produite au produit transformé, nous continuons de réaliser un maximum d’étapes chez nous, ou à proximité. De la source au résultat, nous maîtrisons notre chaîne de valeur. 

Et alors même qu’on ne cesse de parler de relocalisation et de souveraineté industrielle, c’est une réalité ô combien précieuse ! Ensemble, sachons reconnaître et développer ce potentiel et soutenir les acteurs qui en sont à l’initiative. Car cette valeur ajoutée sud aveyronnaise est le fruit d’une longue histoire qui dépasse les individus et traverse les générations. En particulier concernant la production brebis et ses dérivés. 

Vous l’avez compris, c’est ce sur quoi je veux me concentrer ce soir. Parce que l’économie de la brebis est le cœur de l’identité de notre territoire. Parce qu’elle a façonné nos habitudes, nos modes de vie et nos paysages. Et parce qu’elle est le moteur de notre destin commun. 

À commencer par le Roquefort, connu partout dans le monde comme un symbole du savoir-faire français. 

C’est notre produit le plus célèbre et il participe à faire rayonner notre terroir bien au-delà de la région. C’est quelque chose d’énorme dont on ne mesure plus toujours la valeur… nous avons un produit d’exception qui engendre des milliers d’emplois et autour duquel les opportunités de développement restent nombreuses. 

On sait que sa présence dans le sud Aveyron est ancienne, sans pouvoir exactement la dater. Certaines légendes font référence à César, d’autres à Charlemagne. Mais la naissance d’une filière organisée et pérenne remonte plus certainement à l’arrivée des Templiers sur le Larzac. C’est en tout cas un point de départ que je retiens et je vais vous dire pourquoi. À cette époque les Templiers ont contribué à l’essor de citadelles extraordinaires (c’est la Couvertoirade, c’est Sainte-Eulalie de Cernon). Elles ont été leur point d’ancrage. 

Construites au cœur des parcelles qu’ils exploitaient. Ils ont travaillé la terre et élevé les bêtes pour s’enrichir et financer leurs missions. C’est grâce à cette valeur ajoutée qu’ils ont financé leurs causes. C’est l’exploitation d’une ressource au service d’un projet humain. Voilà pourquoi je retiens cette période, car elle est un point de départ solide d’une histoire devenue millénaire. 

Ce roi des fromages est notre force historique… c’est notre fondation. Et même s’il est difficile de mesurer avec précision les emplois directs et indirects de la filière, je crois que nous sommes tous conscients de son importance. Nous sommes aujourd’hui le département français qui compte le plus de brebis : plus d’un million. C’est 15 % du cheptel français… c’est immense ! C’est pourquoi il faut défendre la filière et ses intérêts. En ce moment même sur l’enjeu du Nutriscore, nous faisons bloc. 

Car c’est non seulement une ressource historique, mais surtout une fondation forte pour développer demain notre économie.

La Lacaune a donné à notre territoire sa plus belle identité. Elle façonne nos paysages. Pour l’élever, les Caussenards ont construit des bergeries, des lavognes ou encore des cazelles. Cette présence marquée un peu partout en pointillé rehausse le décor d’une nature déjà splendide. Un patrimoine architectural et culturel d’ailleurs fragile, et qu’il nous faut préserver. D’autant plus qu’il est convoité… et donc soumis à une pression croissante qui nécessite toute notre vigilance. À l’image des lavognes dont certaines sont en train d’être réhabilitées sous l’impulsion du PNR, c’est un patrimoine vivant. Et il doit le rester. 

On y trace des chemins de randonnée, on y organise des parcours de VTT et maintenant de Gravel dont nous sommes devenus une référence… Plus largement, nous renforçons progressivement la qualité et l’étendue de notre offre d’activités de pleine nature. Et j’ai la conviction que cette montée en puissance sera d’autant plus forte qu’on parviendra aussi à en étoffer le narratif. Prendre soin de notre paysage et savoir en raconter l’histoire

À travers l’agropastoralisme, nous défendons aussi l’image d’une agriculture durable qui utilise les ressources disponibles et entretient les espaces naturels. La promotion d’un juste équilibre entre l’homme et la nature. Nous sommes en plein dans les sujets de notre siècle. C’est un développement durable qu’il nous faut continuer à promouvoir à toutes les étapes de la filière. Car c’est un atout réel qui contribue à faire fonctionner notre économie. 

Là encore, des initiatives récentes nous donnent à imaginer les potentiels de développement que nous avons. Je pense au gîte de la Loulette à Nant. Récemment restaurée, cette ancienne bergerie est désormais un lieu magnifique et vivant, prisé par les touristes. 

Dans tous les secteurs, on retrouve des traces de la Brebis. Bien sûr il y a les fromages et notamment le grand Pérail dont l’IGP vient couronner le travail effectué par la filière depuis de nombreuses années. Son histoire est jolie. Le Pérail c’est le résidu. C’est le lait qui déborde et qui était transformé pour ne pas être perdu et revendu ensuite sur les marchés. On optimise et en même temps on nourrit une économie de proximité qui fait la vitalité de nos villages. En langage contemporain on dit que c’est durable, que c’est de l’antigaspillage… le bon sens paysan avait un coup d’avance. Et puisqu’il est à la mode, profitons-en, valorisons-le !

Je pense aux Artisous ou encore aux Bergers du Larzac qui regroupent des producteurs pour créer des fromages de brebis. Ce sont des espaces d’invention et donc des lieux d’avenir. Mais toujours en rapport étroit avec notre terroir. Plusieurs de leurs fromages sont affinés dans des caves naturelles très ressemblantes aux caves Roquefort. Ces caves dites « bâtardes » sont un outil de production et un lieu de visite à ajouter à nos parcours touristiques. Ce réseau de caves pourrait constituer un réseau de découverte et il serait aussi un pont entre de nombreuses productions. 

Ce parcours me fait penser à la route des gantiers. Car notre Brebis a le cuir solide. Tellement que sa valorisation dans l’industrie du textile peut sembler évidente, en particulier dans la ganterie millavoise qui est une filière bien installée. 

Pourtant vous le savez, ce ne sont pas les agneaux aveyronnais qui servent à faire nos gants. Ces derniers sont façonnés à partir du cuir importé et issu de brebis spécifiquement élevées pour la qualité et la perfection de leur cuir. 

À l’inverse, notre Lacaune a été choisie pour son lait et sa peau n’a pas encore trouvé de débouché évident. Pour tout dire les producteurs n’ont même jamais été rémunérés pour ce « 5e quartier » de l’animal. La peau est sans valeur et les abattoirs ne la rachètent pas à nos agriculteurs. Mais je n’ai aucun doute sur le fait que c’est une ressource à valoriser. D’ailleurs, à l’image du projet Peau’Lux, je sais que certains y travaillent et je veux leur redire tout mon soutien. Car sur le sujet les réflexions sont ouvertes. 

Tant en termes de culture que de mode : a-t-on réellement besoin que les peaux des animaux soient parfaites ? Les imperfections sont-elles inacceptables ? Là encore, le Nouveau Monde qui nous attend et l’exigence d’un développement durable nous interrogent. Au-delà du luxe, les débouchés doivent pouvoir se trouver. Et alors même que de nombreuses entreprises cherchent à relocaliser leurs productions, nous aurons des opportunités. Provoquons-les, suivons-les, profitons-en pour développer notre territoire.

Les initiatives en cours pour valoriser les laines de brebis sont toutes aussi intéressantes. En Aveyron, nous avons un potentiel de 1 million de tonnes de laine par an, soit un kilo par brebis. Pourtant elle constitue un coût pour le producteur qui se voit facturer la tonte souvent plus chère que le prix payé pour la laine elle-même…

On sait cela, mais je ne peux m’empêcher d’imaginer les potentiels, que ce soit en matière de textile (très classiquement), de paillage horticole ou en matière d’isolation des bâtiments qui est le grand sujet des vingt prochaines années. C’est pourquoi j’ai choisi de nous réunir ici. Je souhaitais féliciter tout le travail effectué par les équipes de la Filature Colbert et l’ensemble de leurs partenaires. Leur ambition nous projette vers demain. 

D’ailleurs en 2023, nous aurons une étudiante lauréate de la bourse Nufield qui fera ses recherches sur les potentiels débouchés de la laine. Ouvrons-lui nos portes et accueillons sa réflexion avec force et conviction. 

Plus récemment, j’étais dans les locaux de la Savonnerie du Larzac, du Sac du Berger ou chez Myo qui confectionne des chaussons pour nos petits… ce sont des productions émergentes de la galaxie Lacaune. 

Elles constituent une valeur ajoutée supplémentaire et, comme tout nouveau débouché, elles ajoutent une pierre à la grande histoire de la brebis. Elles contribuent à la solidité de notre tissu économique. Je le dis, car en France nous ne valorisons pas suffisamment notre tissu de TPE/PME et pourtant, il est notre cœur battant. C’est notre force. 

Notre avenir est protégé par une filière historique, bien installée, et de plus en plus diversifiée. Et si hier nous considérions ces « autres » productions comme des sous-produits… nous les observons aujourd’hui devenir des filières à part entière. Or cette diversification est non seulement incontournable, mais également une chance pour notre région. Cela est d’autant plus vrai que depuis la crise Covid, notre ruralité est devenue un objet de désir. Notre ruralité est dans l’air du temps. 

Nous avons gagné une attractivité naturelle qui offre de nouvelles opportunités.

Du Sévéragais au Rougier, du Réquistanais aux Causses du Larzac en passant par le plateau du Lévézou, à travers mes déplacements, j’ai vu beaucoup d’énergies sur notre territoire. Certaines que je connais depuis longtemps, d’autres que j’ai découvertes plus récemment. Certaines sont frémissantes, d’autres sont plus matures ; toutes font notre force ! Cet ensemble n’est pas toujours visible et connu. Et c’est ce que j’ai voulu mettre en avant en profitant de cette cérémonie de vœux. 

Mais un discours n’est jamais suffisant. Et avec le temps les mots s’évaporent. C’est pourquoi au fil des déplacements et des discussions que j’ai pu avoir, j’ai pensé qu’il pourrait être pertinent de réfléchir à la création d’une Maison de la brebis

Dans le prolongement de ce qui a été fait à La Cazotte avec Pastoralia, on pourrait ainsi imaginer un lieu qui regrouperait tous les savoir-faire de la galaxie brebis. Ce pourrait être un lieu dynamique où nous accompagnerions des porteurs de projets à lancer de nouvelles entreprises autour de la brebis. Nous regrouperions des savoir-faire, nous partagerions des compétences et surtout, pour ne pas être qu’un lieu-musée pensé pour protéger l’existant, nous en ferions un lieu de développement pour l’avenir. Et un passeur de connaissances entre générations. 

À ce propos, je voulais conclure en insistant sur les enjeux du renouvellement des générations. Car nos agriculteurs sont la pièce fondatrice de ce tissu économique. Ils produisent notre or blanc… et pourtant ! 

Force est de constater les difficultés que nous avons à trouver des jeunes en capacité de reprendre les fermes pour remplacer les agriculteurs qui partent à la retraite. Il y a des sujets de financements, des sujets de transition et d’adaptation entre les productions du cédant et celle du repreneur, que ce soit sur les choix techniques, économiques ou organisationnels… autant de sujets qui nécessitent beaucoup de préparation et d’accompagnement. 

Il est impératif de protéger le foncier agricole et de le rendre accessible aux nouvelles générations. Notre jeunesse fera vivre notre territoire demain. Donnons-lui toute sa place et surtout, octroyons-lui la confiance qu’elle mérite. Avec elle, nous avons les compétences et les moyens de notre développement. 

Demain, nos années seront peut-être considérées par les historiens comme des « années de crises ». Des crises éparses, économiques, sanitaires ou environnementales. Sans rien enlever aux difficultés qu’elles charrient, je pense que ces crises traduisent d’abord le fait que nous traversons des années de grande transition. C’est pourquoi la valeur « travail » devra nous guider. Car c’est par le travail que nous trouverons des solutions. Loin du repli sur soi et de l’action individuelle, c’est un destin collectif que nous avons à construire. Des projets, de la valeur ajoutée… notre territoire à une identité profonde qui nous permet d’aborder l’année 2023 avec détermination. C’est la clé de notre attractivité. 

Chers amis, pour attaquer cette nouvelle année, je vous souhaite le meilleur ! 

Pour vous, pour vos proches, mais également pour tous celles et ceux qui nous servent chaque jour. Je pense à nos soignants, je pense à nos policiers, à nos gendarmes, je pense bien sûr à nos soldats du feu qui ont été très sollicités cet été. Je pourrais citer nos professeurs, le monde associatif… mais vous l’aurez compris, à défaut de citer tout le monde, je souhaite assez simplement porter un message de reconnaissance, de fierté et d’unité. À tous celles et ceux qui travaillent au service de l’Aveyron et de son avenir, je vous souhaite un maximum de réussite en 2023.  Merci à tous !  »

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