A l’emplacement de l’ancien Hôtel de Bonald, disparu le 17 juin 1977, qui était situé à l’angle de la rue Peyrollerie et la rue Saint-Martin, près de la Miséricorde, une placette a été inaugurée en juin 1981, rappelant la mémoire du philosophe Louis-Gabriel-Ambroise de Bonald, qui était né en cet endroit en 1754.
Avec l’opération « Aménagement de la ville » lancée en juillet 1976, projet prévoyant, entre autres, le prolongement de la rue Saint-Martin, son élargissement et son ouverture sur l’Ayrolle, il fut décidé de faire tomber le vieil immeuble de cette illustre famille fortement délabré situé dans l’axe du projet de percée.
Mais on ne pouvait pas pour autant oublier le philosophe Louis-Gabriel Ambroise de Bonald (1754-1840), aussi il fut décidé de créer un petit square en sa mémoire : on y voit un buste, les traits du penseur, sont bien représentés, comme le voulait Mylou du Pays Maigre mais dans un cadre qu’il était sans doute bien loin d’imaginer.
Edouard Mouly (Mylou du Pays Maigre) sur le sujet écrivait alors que la « Place nouvelle » future place Emma Calvé venait d’être terminée en 1935: « N’y a-t-il pas ingratitude pour nous, Millavois, à ne pas honorer ainsi qu’il conviendrait, une pareille mémoire ? Après tant d’autres, me sera-t-il permis de formuler un vœu ? Une grande place s’est créée à Millau, toute voisine du berceau de la famille de Bonald. Ne pourrait-on pas y aménager un petit coin de verdure et, à défaut de statue, ériger un monument très simple avec deux médaillons faisant revivre les traits du Penseur et ceux de son fils le Cardinal ? Millau s’honorerait par cet acte de reconnaissance et de justice » (Alades, Au Monna, 1948)
Son vœu fut en partie exaucé, sans doute n’imaginait-il pas que sa son buste s’élèverait à l’emplacement de ce qui fut sa maison.
L’inauguration du buste
Le vendredi 26 juin 1981, ils étaient une bonne centaine à se retrouver en fin de matinée, devant le buste en bronze fraîchement dévoilé du vicomte Louis-Gabriel Ambroise de Bonald proche de « la nouvelle rue Saint-Martin prolongée ».
Enveloppé d’un drapeau tricolore, le philosophe royaliste reçut d’abord « l’hommage réparateur » du majoral du félibrige, Georges Girard qui retraça la vie et l’œuvre de celui qu’il désigna comme « notre compatriote millavois le plus illustre », le plus pur théoricien de la contre-révolution défenseur acharné de la monarchie et de l’église » (Midi Libre, L’hommage de la ville au philosophe De Bonald, 27 juin 1981)
Un panneau apposé plus tardivement à côté du buste nous rappelle quelques traits de sa personnalité : « Connu avant tout comme le théoricien de la Contre-Révolution et le premier représentant d’une sociologie de l’ordre, fondée sur :
– un pouvoir unique
– une religion publique
– des distinctions sociales inamovibles.
Pour L.G.A. de Bonald, le pouvoir appartient à Dieu, créateur de l’homme et « ordonnateur » de l’Univers. Le monarque n’est qu’un agent de la volonté divine, un symbole de l’alliance entre Dieu et les hommes.
C’est la soumission aux volontés divines, et non aux lois humaines, qui peut garantir à la société, liberté et indépendance. C’est la famille qui est le modèle et le symbole de toute société. Mais plus qu’un idéologue, L.G.A. de Bonald est un penseur et un moraliste qui tire des évènements vécus une réflexion profonde sur la société. »
Lors de l’inauguration, après Georges Girard, Manuel Diaz, maire de Millau rappelait la haute figure de celui qu’il nomma « son illustre prédécesseur, premier maire désigné puis élu de Millau ».
En effet, Louis de Bonald fut maire de Millau de 1785 à 1791, date à laquelle il démissionna en raison de son hostilité à la Constitution civile du Clergé.
Manuel Diaz, revenant sur un passé récent qui avait fait couler d’encre expliqua : « Je ne crois pas avoir fait injure à la mémoire du vicomte De Bonald en ayant pris la décision, combien contestée, d’avoir démoli son vieil hôtel ».
Nombreux furent les élus et personnalités à s’être rendu présent pour cette inauguration, parmi ceux-ci, Cyprien Trouche, premier adjoint ; Jacques Godfrain, député du Sud-Aveyron ou encore Jean Sarton du Jonchay, sous-préfet de Millau qui se chargea de découvrir le buste de bronze et la plaque commémorative.
Devant ce buste, Manuel Diaz trouva celui-ci bien plus expressif que celui en plâtre qui servit de modèle et qui se trouvait dans le hall de la mairie. Il précisa : « c’est un hommage discret, mais significatif des sentiments que les Millavois portent au philosophe ». Enfin, le maire se félicitait que la rénovation du vieux Millau (dont la nouvelle rue Saint-Martin constituait « le prélude de ce que nous voulions faire » soit placée « sous le haut patronage posthume de L.G.A. De Bonald ».
Au vœu de Mylou du Pays Maigre de voir un coin de verdure avec un petit monument dédiée au philosophe, Jules Artières lui aussi voulut en son temps qu’on lui élève un ouvrage architectural : « Puisse notre commune ne plus tarder à rendre hommage à De Bonald, un juste tribut d’hommages, en lui élevant sur une de nos places publiques, un monument qui rappelle aux générations futures les traits d’un des plus profonds génies philosophiques et chrétiens des temps modernes, une des plus grandes gloires dont s’honorent notre province et notre patrie » (Millau à travers les siècles, p.236, 1943).
Un vœu réalisé en ce vendredi 26 juin 1981.
Marc Parguel