Millau. Le groupe « Vraie pluralité » continue de faire de la résistance

Fanny Alméras
Fanny Alméras
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Photo d'archives. De gauche à droite : Bernard Grégoire, Fréderic Laur, Corinne Compan, Sophie Taroux, Corine Mora, Martine Bachelet et Cathy Jouve (retenue ce jour-là par des obligations professionnelles).

Il y a près de 4 mois, sept élus de la majorité municipale millavoise constituaient un groupe indépendant appelé « Vraie pluralité » dans le but de faire entendre leur voix suite à des désaccords avec Emmanuelle Gazel, maire de Millau. Aujourd’hui, à la faveur d’une conférence de presse, ils expliquent que « la situation n’a pas favorablement évolué » et qu’elle se serait même « considérablement dégradée ».

Le contexte de départ

En préambule, ils reviennent sur le contexte qui les a poussés à se rassembler. Le vote pour Michel Durand en tant que premier adjoint pour remplacer Thierry Perez en 2022 n’avait pas recueilli l’ensemble des voix de la majorité. À l’issue du conseil municipal, la maire de Millau avait réuni ses élus et demandé qui avait voté, pourtant à bulletin secret, contre son élection. Martine Bachelet explique qu’elle s’est « dénoncée ». « Le ton est monté et nous nous sommes disputées. À partir de là, j’ai eu droit au tribunal d’autres élus qui ont décidé de me retirer ma délégation. J’ai été convoqué par Nicolas Wöhrel et Emmanuelle Gazel, on m’a demandé de rentrer dans le rang ». C’est suite à ce même conseil municipal que trois élus avaient décidé de démissionner.

Soudés autour de Martine Bachelet, les six élus du groupe « Vraie pluralité » font alors de la résistance et menacent « de démissionner collectivement si la tête de l’élue venait à tomber ». Un chantage assumé par le groupe qui permettra finalement d’apaiser la situation sans toutefois la régler. Le calme aura cependant été de courte durée, c’est une délibération lors du conseil municipal du mois d’avril dernier qui remettra le feu aux poudres et déclenchera la constitution du groupe vraie pluralité. Elle concernait la vente d’une maison rue Condatomag en zone PPRi et à laquelle la commission « Qualité de vie » s’était à l’unanimité opposée. Malgré cela, la maire de Millau était « passée en force », soulignent les élus qui rappellent l’allusion au 49.3 qu’avait fait Christophe Saint-Pierre lors du vote en Conseil.

« Nous avons donc constitué ce groupe pour travailler librement dans nos délégations sans être soumis à quelconque pression en revendiquant notre liberté d’opinion et de vote en conscience dans le but commun d’honorer nos responsabilités d’élus et construire autant que possible avec l’équipe de la majorité », expliquent les élus toutefois « attachés » à la majorité municipale qu’ils représentent.

Une situation qui se détériore

« Nous ne voulons pas être opposés à tout ni lui mettre des bâtons dans les roues, nous sommes quand même dans la majorité. Nous pensions que les choses allaient s’améliorer, mais on s’aperçoit qu’au contraire, elles se détériorent », déplorent les sept élus en dénonçant toujours « une posture radicale de la maire de Millau » et « une impossibilité à s’exprimer et être écoutés du moment que les avis divergent » ainsi qu’un « manque d’écoute et de partage ».

« Lorsqu’on n’est pas d’accord, son mode de fonctionnement c’est : tu n’as pas compris, je vais t’expliquer. Nos délégations sont peu à peu vidées, madame la maire se dit victime bashing et souhaite désormais signer tous les courriers positifs », expliquent les membres du groupe qui regrettent de ne plus « jouer leur rôle d’élus » en précisant que désormais « la maire assiste à toutes les commissions que l’un d’entre eux préside (finance, qualité de vie et conseil d’administration du CCAS). Elle aurait même, selon eux, « refusé de les recevoir pour désamorcer la situation ».

« Au lieu de se remettre en question, elle verrouille tout. Elle veut tout maîtriser, tout chapeauter, ne fait confiance à personne, on est surveillés, même au sein des services, c’est devenu compliqué de travailler. C’est important et normal qu’on n’aille pas toujours dans le même sens et qu’on puisse avoir des avis différents au sein d’un même groupe. Mais quel est notre rôle si on doit faire de la figuration ? Un maire quel qu’il soit doit être à l’écoute des citoyens, mais aussi de ses élus », lance Corinne Compan qui rappelle que « la liste Gazel est passée grâce à l’union de la gauche locale aux dernières élections municipales ».

« La pluralité, c’était le but de notre union, je suis abasourdie par cette situation et cette non-écoute. Tout le travail qu’on a fait est en train de s’écrouler », regrette l’adjointe aux solidarités et au handicap.

La récente actualité ne va sans doute pas apaiser les choses. Le groupe Vraie pluralité parle de « manipulation et de mensonges » sur le brûlant sujet du Fablab et du Silex et déplore « l’inaction de l’édile sur le sujet de l’hôpital ».

Sans avouer être une fois encore en désaccord avec Emmanuelle Gazel sur le sujet de la piétonnisation qui faisait partie de leur plan de mandat, le groupe admet toutefois que « les récentes propositions faites par les commerçants méritent d’être prises en compte et que le schéma actuel de la piétonnisation doit évoluer en concertation avec les commerçants et les Millavois sur un modèle saisonnier ». 

Vers une démission collective ?

Si pour l’heure aucune décision concernant l’avenir du groupe au sein de la municipalité n’a été actée, le spectre de leur démission plane toujours dans le ciel du mandat d’Emmanuelle Gazel.

« On y réfléchit, une démission n’est pas exclue, mais on a toujours espoir qu’il se passe quelque chose et que ça change. Nous devons travailler collectivement, nous ne sommes pas un groupe politique, nous ne voulons pas être considérés comme un groupe d’opposition, nous sommes avant tout là pour servir l’intérêt des Millavois. Notre groupe est ouvert, parmi les autres élus, nous sommes certains que d’autres pensent comme nous. S’ils ont choisi de suivre bêtement et d’aller en conseil ou en réunion juste pour faire chambre d’enregistrement et lever la main et dire oui systématiquement, c’est leur problème, plus le nôtre.  Nous, on a choisi de pouvoir exprimer nos idées et de pouvoir dire non parce qu’on a des convictions et des valeurs. Nous sommes pour la transparence et refusons le mensonge, insistent les élus avant de conclure que, contrairement à ce que dit la maire, non, tout ne va pas bien ! »

Entre la maire de Millau et le groupe Vraie pluralité, il semble que le torchon brûle et que le dialogue soit au point mort. Emmanuelle Gazel n’a pour l’heure pas souhaité répondre sans toutefois exclure de le faire ultérieurement.

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