Opinion. « Sud-Aveyron : 10 directeurs pour un désert médical ? »

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Dans un document diffusé ce week-end sur les marchés de Millau et Saint-Affrique, le collectif Le Manifeste partage ses préoccupations concernant la situation actuelle des hôpitaux du Sud-Aveyron. Il revient sur les engagements formulés par le directeur de l’ARS lors de sa venue à Saint-Affrique le 29 avril, et interpelle sur les choix opérés par la direction dans le cadre de la mise en œuvre du projet d’hôpital commun. Le collectif questionne notamment le rôle des dix directeurs nommés, la place des médecins titulaires, les perspectives de recrutement, ainsi que les investissements prioritaires. Il appelle à un débat sur les conditions d’accès aux soins, les projets médicaux locaux et les arbitrages budgétaires à venir.

« Un autre avenir que la casse de la santé est possible

Lors du dernier échange avec le représentant de l’ARS et la direction de l’hôpital qui s’est tenu le 29 avril à Saint-Affrique, la vérité de la gestion actuelle est clairement apparue. Des tonnes de propagande ne peuvent masquer la casse.

En abreuvant les habitants d’images et de discours sur un hôpital virtuel, sur des recrutements massifs de médecins, les 10 directeurs (!) de nos hôpitaux veulent faire oublier les conséquences de leur gestion.

Les fonds alloués à nos hôpitaux semblent consacrés à développer un outil de propagande plus qu’à tenir les engagements pris1 sur le maintien des services et l’accès de proximité.

Les Urgences sont menacées cet été à Saint-Affrique et Millau Derrière les annonces et le mot « régulation », s’organise dès à présent une restriction d’accès aux urgences pour les habitants

L’accueil en EHPAD et la gestion de la GÉRIATRIE sont menacés à Saint-Affrique par la décision de la direction de pousser au départ deux médecins. La suppression du coordonnateur menace la réalisation des budgets à venir.

Le manque de médecins est invoqué, il est réel, mais

Cette pénurie a été organisée par l’ordre des médecins et les gens au pouvoir – rien n’est dit des raisons qui poussent de nombreux médecins et soignants à démissionner – les médecins qui se sont présentés sur Saint-Affrique n’ont pas été retenus

La majorité des postes médicaux est assurée par des contrats intérimaires ou des médecins détachés n’assurant qu’une petite partie des heures des titulaires partis, pour des conséquences financières sur les budgets.

Le projet médical du sud Aveyron se réduit au fur à mesure. Le pôle à trois sites a été abandonné pour se résumer à « l’hôpital commun ».

Un autre avenir est possible, ici aussi.

  • Que les élus exigent des 10 directeurs le respect des engagements sur la rénovation des services de proximité des hôpitaux actuels qui devront rester, et pourra être tenue la promesse de maintien des services actuels !
  • Que les moyens d’assurer « l’accès aux soins à 15 min » 2 soient expliqués et mis en œuvre.
  • Que le nombre de médecins et de soignants formés soit réellement augmenté en proportion des besoins.
  • Que la promesse « d’augmenter les capacités et les possibilités de soins dans le Sud-Aveyron » 3 soit respectée, au lieu de voir le nouveau bâtiment les réduire.
  • Que l’on privilégie les investissements sur les équipements médicaux (comme les blocs) ou les soignants plus que sur les postes de directeurs.

Les parlementaires commencent à s’inquiéter de la dérive actuelle. En votant, par exemple l’obligation pour les médecins d’attendre un départ pour s’installer dans les 10 % du territoire « dotés » ou un moratoire sur la fermeture des maternités pour tenter d’enrayer la forte hausse des mortalités infantiles qui accompagne les fermetures de petites maternités.

Mais dans le même temps, les lobbys médicaux se mobilisent pour bloquer ces initiatives et continuer une politique catégorielle et le gouvernement avec l’extrême droite agricole réintroduit l’épandage de poisons dans la nature et les aliments.

En octobre aura lieu le vote du budget de la sécu. Un moment de vérité aura lieu ! Tout est question de choix, il n’y a pas ici de faits « objectifs et indiscutables ». Notre député qui s’est proclamé « le député de la santé » pour se faire élire, en votant à deux reprises récemment pour soutenir les lobbys médicaux contre les habitants, fait, lui aussi ses choix.

Suite à son passage à Saint-Affrique le directeur de l’ARS avait pris des engagements, Le Manifeste lui a écrit le 4 mai pour en reprendre quelques-uns (…)

1 – La réouverture de la deuxième ligne aux urgences ne semble pas en bonne voie, alors que la direction a proclamé le retour au fonctionnement normal (et donc la fin de la régulation) pour juin 2025.

2 – Le rejet des propositions médicales faites par les médecins en poste depuis des années ayant entraîné leurs départs, l’EHPAD est très menacé, même si une médecin libérale a accepté de prendre en charge des patients. (…) La reconduction pour un an du budget actuel que vous avez accepté permet un délai pour recruter un médecin gériatre. Nous attirons votre attention sur le suivi de ce recrutement, car l’attitude de la direction actuelle est largement responsable de cette situation.

3 – Les préventions émises par la direction sur les propositions des médecins de l’imagerie sont inacceptables. Quand le manque de médecins est toujours mis en avant, comment comprendre que les deux projets de services utiles aux habitants puissent être mis de côté, alors que des médecins se proposent de les assurer localement.

Quand les moyens ne sont plus donnés au service public, comment comprendre les freins mis sur les propositions des médecins libéraux, autrement que comme la volonté de refuser les soins aux habitants ?

Deux projets permettraient d’apporter des réponses de proximité au lieu d’être contraints d’aller à Montpellier et d’attendre des semaines.

La cimento-plastie et les gestes biopsiques permettant des diagnostics sur le cancer, dans le cadre de l’imagerie interventionnelle sont toujours en attente alors que la condition principale est d’y consacrer deux lits quand quarante sont fermés.

Une nouvelle proposition de « petite » chirurgie sur des hernies, rachis et autres actes de décompression est faite par un chirurgien.

1 En 2022 par le directeur de l’ARS, 2 En 2025 par la présidente de Région, 3 Dans le PMSA approuvé en 2020.

Le bloc de l’hôpital trouverait là une consolidation de son rôle.

Le projet mérite mieux que d’être caricaturé en volonté de faire un CHU. Même si une rénovation du bloc était nécessaire, elle mérite une véritable étude. On sait que l’usage de ce bloc par les médecins privés est particulièrement rentable pour l’hôpital. À ces deux projets, nous ne voyons que des conséquences positives pour les habitants et pour l’hôpital (…)

Le directeur des hôpitaux freine toujours des quatre fers, alors que ces services n’existent pas dans le Sud-Aveyron. Et que dire de la passivité complice de la direction, face aux départs de jeunes médecins de l’hôpital de Millau ? Faut-il 10 directeurs pour bâtir un désert médical ? »

Le Manifeste : siège social Mairie de Saint-Affrique 12400 Adresse Internet : lemanifeste@orange.fr

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