« Vu d’Allemagne », avec le comité de jumelage Millau – Bad-Salzuflen

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Le Comité de Jumelage Millau – Bad Salzuflen propose de vous faire mieux connaître le point de vue de nos amis allemands. Il s’agit de vous présenter des articles sur des usages, des traditions, des faits d’actualité ou des faits historiques. Les enquêtes et témoignages seront rédigés par les membres du comité en lien avec leurs amis de Bad Salzuflen. Ils seront heureux d’accueillir vos remarques et vos suggestions afin d’enrichir les échanges et la qualité des billets publiés. Une petite invitation au voyage sans sortir de chez soi…

De quoi Werner Heisenberg est-il le nom ?

Père fondateur de la mécanique quantique, prix Nobel de physique en 1932, Werner Heisenberg (1901-1976) est celui sans lequel 30 % de la production industrielle mondiale n’existeraient pas aujourd’hui.

Physicien génial, féru de mathématiques, il crée le fameux principe d’indétermination, faussement encore souvent traduit par principe d’incertitude, régissant le monde de l’infiniment petit.

En 1927, alors qu’il est âgé de 25 ans, atteint par un rhume des foins dont les affres vont jusqu’à le défigurer, il se réfugie, le visage tuméfié de boursouflures, pendant 15 jours sur l’île de Helgoland au nord de l’Allemagne afin de se soigner. Là, après avoir appris par cœur le recueil de poésies de Goethe, « le Divan occidental-oriental », il escalade, de nuit, une falaise gigantesque et y attend le lever du soleil sur la mer du Nord.

Lorsque le soleil jaillit par delà l’horizon, l’une des idées les plus créatrices, renversantes et puissantes des temps modernes le traverse. Il est révélé au monde invisible des particules élémentaires. Heisenberg comprend que dans l’atome, pendant que toute la physique des années 20 cherche à déterminer la trajectoire de l’électron autour du noyau, ce même électron n’a dans la réalité, ni trajectoire, ni lieu, ni vitesse.

Dès lors que vous mesurez la vitesse d’un électron, vous perdez automatiquement sa position et vice versa. Vous ne pourrez jamais connaître sa situation dans le temps si vous connaissez sa situation dans l’espace et inversement. Autrement dit, l’électron a une réalité floue, indéterminée, qui ne se matérialise que si vous la mesurez. L’électron n’a donc ni permanence, ni continuité, ni trajectoire.

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C’est l’observateur qui oblige la particule à sortir de son existence sans contour. Le physicien en la mesurant la force à être ou à faire, mais avant la mesure, elle n’est pas encore tout à fait advenue… Le système atomique n’est plus désormais comparable à celui d’un système solaire ou galactique. Le microscopique ne fonctionne plus comme le macroscopique. La matière n’est plus faite de matière. Le monde n’est plus déterminé. Il devient probabiliste.

Ce sont les probabilités mathématiques qui régneront dès lors et non plus les certitudes… C’est la mesure même qui influence et impacte l’objet mesuré : extraordinaire !

Il renverse ainsi la loi de la causalité, si chère à Immanuel Kant, qui devait jusqu’alors donner des règles strictes d’ordonnancement à la nature. Ce fut pour lui un drame philosophique. Il demanda aux philosophes de son temps de se pencher sur la question. Encore ignorée de nos jours, elle est restée sans réponse.
Ainsi naquît la nouvelle théorie physique révolutionnaire, la mécanique quantique. Elle apportera aux technologies contemporaines un essor fabuleux de prouesses en ingénierie, dans l’industrie et ce jusqu’au monde des nanotechnologies.

Heisenberg, outre son génie hors pair, était ce qu’on pourrait appeler un être complet. Très grand pianiste, il connaissait les cinq concertos pour piano de Beethoven par cœur pour ne citer que cet exemple. Il était également très sportif (escalade, ski, tennis, etc.) et un artiste de la pensée au génie créatif bouleversant.

On aura parfois souillé ses intentions de recherche en répandant de graves contre-vérités historiques, notamment le fait d’avoir participé à l’élaboration de la bombe atomique. Il s’agit là d’un mensonge éhonté, démenti par tous ses biographes allemands. En revanche il a beaucoup œuvré à la faisabilité du réacteur nucléaire, sans lequel, rappelons-le, 75% de la production électrique française n’existeraient pas.
Werner Heisenberg est mort le 1er février 1976. Nous commémorons cette année le 45e anniversaire de sa mort.

Pour finir, je vous laisse méditer sur l’une de ses pensées profondes : « Même si l’homme peut faire ce qu’il veut, il ne peut pas vouloir ce qu’il veut »…

Claude SPILLMANN

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